Présentation du projet Dé_montages
Intervention à l’occasion de la matinée d’études du CSEM du 31 mars 2022

Le projet que je vais présenter brièvement ici a démarré à l’Université de Liège en 2019. Il rassemble un collectif de chercheuses et de chercheurs situé au croisement des études médiatiques, de l’analyse rhétorique du discours et de la didactique de la communication. Intitulé L’éducation aux médias aujourd’hui: pour une nouvelle généalogie critique (GENEAM), il est dirigé scientifiquement par François Provenzano, professeur de sémiotique et de rhétorique, et Jeremy Hamers, chargé de cours en éducation aux médias et cinéma documentaire; avec la collaboration d’Élise Schürgers, doctorante en analyse du discours, et de moi-même qui suis chargée de cours en didactique de l’information et communication et en éducation aux médias numériques.

Mon intervention s’organisera en deux temps : tout d’abord, je parlerai de l’ancrage scientifique de ce projet et je le situerai par rapport à l’agenda de recherche du CSEM, ensuite, je ferai part des activités en cours et à venir menées par le collectif qui l’anime.

Origines et positionnement par rapport à l’agenda de recherche du CSEM

Tout d’abord, pourquoi cette approche généalogique ? En fait, c’est un projet qui poursuit l’ambition d’interroger les paradigmes actuels de l’éducation aux médias tels qu’on peut les identifier dans les textes institutionnels ou les ressources pédagogiques; et, en particulier, les lignes de démarcation qui se sont établies, et peu à peu figées, autour d’oppositions du type « spectateur lucide et critique » vs. « spectateur crédule et manipulé », « discours vrai » vs. « discours faux », « information objective et neutre » vs. « information subjective et orientée », « bonne pratique des médias » vs. « mauvaise pratique des médias », etc. Pour le dire autrement, il nous semble que les paradigmes actuels de l’éducation aux médias s’intéressent prioritairement à l’élaboration, d’une part, de grilles de lecture amenant l’usager à pouvoir évaluer la fiabilité d’une information et, d’autre part, d’un guide du bon usage des dispositifs médiatiques.

Ce point de départ critique, en soi, n’est pas inédit, puisqu’un grand nom de l’éducation aux médias comme David Buckingham avait déjà attiré notre attention dans des publications récentes (Buckingham 2019; 2020) sur ce risque d’une simplification des enjeux de l’éducation aux médias qui ferait l’impasse sur un paysage plus large intégrant, au plan économique, la logique du capitalisme numérique — ou de surveillance, cf. (Zuboff 2019) et, au plan politique, une fragmentation et une polarisation croissante des sociétés. Dans ce contexte, apprendre à l’usager des médias à distinguer entre usages vertueux et nuisibles, entre information et désinformation revient en quelque sorte à traiter davantage les symptômes que les causes. Buckingham parle à cet égard de solutionnisme :  au moment où la société rencontre un problème quel qu’il soit — les grossesses adolescentes, le radicalisme, la drogue, la crise climatique, etc. —, la solution sera toujours de demander plus d’éducation ; mais le souci avec ce genre de positionnement (même si, évidemment, on ne va pas dire qu’on est contre l’éducation, cela n’aurait pas de sens au regard même de nos fonctions), c’est qu’il fait porter aux parties prenantes de l’éducation aux médias (apprenants et enseignants) la totale responsabilité de leurs usages médiatiques, sans considérer que les pouvoirs décisionnaires puissent avoir un rôle à jouer, par exemple en matière de souveraineté numérique. D’autre part, pour un usager des médias, le fait de se penser averti et lucide, parce qu’il a reçu des formations lui apprenant à repérer les fausses informations, risque d’inhiber une nécessaire lecture critique des messages médiatiques — c’est un risque que Buckingham avait également souligné :

What we need here is more than a checklist: we need critical thinking. The other danger here is the assumption that once we’ve identified the fake news, then the ‘real’ news is absolutely fine. But critical thinking has to apply to the work of professional journalists and news organisations just as much as to fake news.

(Buckingham 2020)

De ce point de vue, on peut signaler des recherches récentes comme celles de Winston (2020), qui expliquent, étude historique à l’appui, que le journalisme ne peut pas être objectif, ce n’est pas compatible avec son pacte de lecture — je ne vais cependant pas m’y attarder, car l’ouvrage est sur notre pile de lecture mais on ne l’a pas encore parcouru assez attentivement.

Si nous partageons ces premiers constats d’une forme d’instrumentation (création de kits d’outils) et d’instrumentalisation de la discipline (la finalité est-elle encore un apprentissage des médias ou une tentative politique de donner l’apparence d’une prise en main de certains problèmes sociaux par davantage d’éducation?), nous voudrions pour notre part rechercher, à travers une investigation généalogique, théorique, d’autres manière de penser l’éducation aux médias, et en particulier sa visée émancipatoire.

En effet, comme on vient de le souligner, le partage entre « vérité » et « fausseté » d’un discours médiatique est aujourd’hui le socle inébranlable du projet émancipateur de l’éducation aux médias (le spectateur « éduqué » aux médias serait celui qui se serait libéré des fausses informations et des biais cognitifs, et plus largement des effets, notamment affectifs, des productions médiatiques). Or, il n’est pas certain que cette conception résiste toujours à l’épreuve des usages médiatiques ordinaires, tant du point de vue de la production que du point de vue de la réception : la double association entre « discours vrai » et donc « légitime » d’un côté, et « discours faux » et donc « illégitime » de l’autre, est-elle si évidente à reconnaitre dans les formes mêmes des productions médiatiques (par exemple, la scénographie d’un reportage d’investigation sur une grande chaîne publique diffère-t-elle vraiment de certains codes visuels de documentaires reconnus comme « complotistes »)  ? Surtout, la reconnaissance d’un discours comme « faux » suffit-il à le discréditer ? D’autres clés de lecture seraient sans doute à même de répondre aux enjeux associés à ces discours médiatiques de la désinformation, comme l’identification de la manière dont s’entremèlent, par des agencements complexes, des régimes de discursivité (fiction, information, témoignage, analyse, etc.) et des positions de sujet (narrateur, témoin, porte-parole, etc.) en variation constante — ce qu’on peut saisir depuis nos domaines disciplinaires respectifs.

Plus précisément, le projet GENEAM prend pour hypothèse qu’en s’érigeant depuis la fin des années 1960 en discipline autonome, et en s’affranchissant des évolutions associées à ses origines théoriques (qui peuvent être retrouvées la théorie critique de l’École de Francfort (Adorno et Horkheimer [1947] 2012), l’approche esthétique de l’école anglaise dans la lignée des travaux de Len Masterman (Masterman 1985; Landry 2017, paragr. 43 sqq.) ainsi que dans les approches sémiologiques, par exemple les travaux de Barthes sur la rhétorique de l’image (Barthes 1957; 1964), l’éducation aux médias pourrait avoir perdu en chemin une série de ressources qui lui permettraient de dépasser les limites de ce paradigme dominant, et qui se manifestent aujourd’hui par une difficulté de la discipline à théoriser et à outiller l’analyse de la production et de la circulation de « faux » face à ces nouveaux régimes de production médiatiques.

Nous souhaiterions donc trouver des manières de nous inscrire dans le champ de l’éducation aux médias tout en contournant ces paradigmes, non pas parce que l’on pense que des démarches comme le fact checking ou le débuncking ne seraient pas utiles — ce n’est en aucune manière notre propos et ce sont par ailleurs des outils indispensables pour garantir l’exercice de la citoyenneté dans le respect du droit à l’information (art. 19 DUDH) — mais bien parce que ces approches en viennent finalement à dominer tout le champ, et qu’un tel primat laisse des taches aveugles dans la démarche d’appréhension critique des contenus médiatiques; notamment parce qu’on s’intéresse moins aux mécanismes de production de sens par un spectateur situé, à savoir pourquoi, affectivement, certains messages médiatiques, même estampillés comme faux, vont malgré tout rencontrer l’adhésion des publics, générer des affects, par exemple via le jeu des connotations associées à ces contenus. On peut aussi se demander dans quelles histoires spectatorielles, ou quelles biographies médiatiques (avec les connexions intermédiatiques qu’elles impliquent) s’inscrivent ces effets d’adhésion. Et ces questions, on se les pose parce que nous ne sommes pas journalistes et donc, même si dans nos disciplines on s’attache aussi à la critique des sources, on ne va pas réellement être outillés pour valider ce qui relève ou non de l’information fiable, mais nous avons des clés de lecture qui permettent de penser le faux en le situant au regard des productions culturelles, et des conditions de leur réception.

Donc ce thème du “faux” sera une porte d’entrée, en effet, mais pas dans l’idée de dégager du vrai, parce qu’en réalité, à partir de nos disciplines, on ne va pas se demander si les médias mentent ou disent la vérité. Par contre, on va s’intéresser au rôle qu’ils jouent dans les processus de médiation des savoirs, de l’information, de la culture. C’est-à-dire qu’il peut y avoir dans les représentations qu’ils donnent des prétentions à vouloir dire la vérité, mais c’est alors une question de régime de discours ou, comme le dirait Odin, d’axe de pertinence à travers lequel on produit et on reçoit les contenus médiatiques (Odin 2011) — là, on mobilise une approche de type sémio-pragmatique qui permet de dépasser le binarisme simpliste entre un régime véridictoire et un régime fictionnel.

Pour donner un autre exemple, la matérialité formelle des médias numériques va entrainer des jeux de fabrication des contenus, pouvant mobiliser le faux d’une manière ludique — je pense par exemple à la culture participative qui se déploie sur les plateformes numériques (Jenkins 2006; Jenkins, Ito, et Boyd 2015), et les pratiques de re-mix qu’elle amène (la création de mèmes, de photomontages, etc.) — à la lumière desquelles on pourrait, comme certains l’ont fait (Jenkins, Ito, et Boyd 2015, 109), lire la fabrication de hoaxes. Et cela, une approche par le prisme de nos formations disciplinaires respectives, soit des domaines qui s’intéressent aux productions culturelles, est à même de les fournir. En effet, l’enseignement et la recherche en information et communication à l’ULiège se caractérisent par des liens forts avec les approches sémio-rhétoriques des discours et avec les théories critiques de la culture et de ses formes médiatiques. Un récent projet “ARC” (Action de Recherche Concertée), qui associait également des philosophes a cherché, à cet égard, à développer l’idée des “Humanités critiques” comme coupole transdisciplinaire, sous laquelle trouverait naturellement sa place une éducation aux médias pensée à nouveaux frais. C’est-à-dire que l’éducation au média pourrait viser la création de savoirs critiques, soit des savoirs réflexifs, conscients de leurs conditions matérielles de production, de circulation et de diffusion ainsi que des enjeux qu’ils représentent dans le champ social (Leclercq 2014) ; des savoirs eux-mêmes source de création par les interprétations critiques qu’ils permettent de produire. En ce sens, le spectateur n’est jamais passif (Rancière 2008).

Un dernier exemple enfin, lié au précédent: les textes numériques ne sont à aucun moment des objets simples, il s’agit au contraire de composites associant technique et symbolique; gestes, discours et support matériel. De ce fait, les médias informatisés apparaissent comme un espace de pratiques (Tardy et Jeanneret 2007), puisqu’ils possèdent cette caractéristique propre d’être à la fois des médias d’écriture et de lecture. Ces pratiques sont fortement contraintes par les possibilités techniques du dispositif (choix des signes pour l’expression type emoji ou étoiles pour l’évaluation, formes et gabarits imposés, etc.), mais acceptées par l’usager qui va s’engager, participer à la production de contenu dans ces médias, parce que ses pratiques sont justement nourries par des discours d’escorte exprimant des promesses, mobilisant des imaginaires évoquant la liberté, la prise de pouvoir, le partage, etc. Dirait-on que ces discours sont faux? On pourrait, bien sûr, relever, par exemple, que les interactions sur Facebook sont favorisées non pas par le désir désintéressé exprimé par Mark Zukerberg de favoriser les contacts humains, mais au contraire de stimuler les échanges numériques pour récolter davantage de données comportementales à analyser, ce qui permettra de prédire les comportements futurs, et de monnayer ces analyses au prix fort auprès d’entreprises ou d’organisations politiques. Mais ce n’est pas l’idée si l’on cherche à comprendre le fonctionnement de ce média en tant que dispositif communicationnel. Il faut bien entendu élucider les motivations économiques qui commandent l’instrumentation technique du dispositif, mais dans le même mouvement comprendre les prétentions à agir sur les formats de la communication tout comme la manière dont les usagers s’y ajustent et se les approprient. L’intérêt d’étudier ces discours d’escorte est précisément qu’ils orientent la production du sens et qu’une analyse critique doit rendre compte, tout ensemble, de ces éléments (Davallon et al. [2003] 2013; Souchier et al. 2019).

Donc, si l’on se réfère à la “cible” qui nous a été communiquée pour nous situer au regard de l’agenda de recherches du CSEM (ci-dessous), on navigue en quelque sorte entre les cercles 1 et 3, et c’est compliqué depuis notre position de définir ce qui est premier, de l’œuf ou de la poule. En effet, l’idée même d’une investigation généalogique qui permettrait de considérer d’autres lignes de partage que celles dominant le champ actuellement nous situe clairement dans le cercle extérieur; mais la démarche s’ancre dans un regard critique exercé par la pratiques de nos disciplines, c’est avec ce regard qu’on saisit ce qui nous pose question dans les paradigmes dominants en éducation aux médias; et les disciplines dans lesquelles nous inscrivons nos travaux (donc pour mémoire, on parle de la sémiotique, la rhétorique, l’analyse du discours, la didactique de l’information-communication et les études filmiques) vont elles-mêmes, potentiellement, fournir des ressources pour alimenter à nouveau frais les recherches en éducation aux médias et en littératie médiatique.

Source: CSEM

Activités

Nous travaillons actuellement à la construction d’une plateforme en ligne appelée Dé_montages. Usage du faux en éducation aux médias, et notre souhait est qu’elle puisse rassembler des ressources à destination de tous les publics en quête d’outils réflexifs pour saisir les productions médiatiques que chacun et chacune peut rencontrer au quotidien. Le montage désigne ici une opération très concrète de juxtaposition d’images et de textes, à priori hétérogènes, qui produit des effets de mise en étrangeté réciproque. On y trouvera:

  • des productions médiatiques, de tout genre et de toute époque ;
  • des textes théoriques, parfois anciens et oubliés, centrés sur la portée critique de l’éducation aux médias ;
  • des analyses de productions médiatiques, sous la forme d’articles, d’interventions ou de débats ;
  • des ressources relatives à l’actualité de l’éducation aux médias.

La mise en place de cette plateforme s’accompagne, ce quadrimestre-ci, d’un cycle de rencontres visant à pluraliser les points de vue sur les enjeux et les limites de l’éducation aux médias. Dans la lignée des ambitions exprimées par le projet GENEAM, ce cycle souhaite interroger, par l’invitation d’intervenants issus d’horizons différents (cultural studies, histoire de la presse, rhétorique, sciences de l’information et de la communication, etc.) les fondements et les présupposés de la discipline. Chaque rencontre prend la forme d’un duo, uni par une parenté disciplinaire, où chaque intervenant est invité à explorer la manière dont son travail peut nourrir cette manière de repenser l’éducation aux médias. En guise de clôture du cycle, une table-ronde est prévue au mois de mai, qui rassemblera des acteurs et actrices de terrain pratiquant l’éducation aux médias dans les écoles et dans le secteur associatif. 

Bibliographie

Adorno, Theodor W., et Max Horkheimer. (1947) 2012. Kulturindustrie: raison et mystification des masses. Paris: Allia.

Barthes, Roland. 1957. Mythologies. Paris: Éditions du Seuil.

———. 1964. « Rhétorique de l’image ». Communications 4 (1): 40‑51. https://doi.org/10.3406/comm.1964.1027.

Buckingham, David. 2019. The Media Education Manifesto. Cambridge, UK: Polity Press.

———. 2020. « Epilogue: Rethinking Digital Literacy: Media Education in the Age of Digital Capitalism ». Digital Education Review, no 37: 230‑39. https://doi.org/10.1344/der.2020.37.230-239.

Davallon, Jean, Marie Després-Lonnet, Yves Jeanneret, Joëlle Le Marec, et Emmanuël Souchier. (2003) 2013. Lire, écrire, récrire : Objets, signes et pratiques des médias informatisés. Études et recherche. Paris: Éditions de la Bibliothèque publique d’information. http://books.openedition.org/bibpompidou/394.

Jenkins, Henry. 2006. Convergence Culture: Where Old and New Media Collide. NYU Press.

Jenkins, Henry, Mizuko Ito, et Danah Boyd. 2015. Participatory Culture in a Networked Era: A Conversation on Youth, Learning, Commerce, and Politics. Cambridge, UK ; Malden, MA: Polity Press.

Landry, Normand. 2017. « Articuler les dimensions constitutives de l’éducation aux médias ». tic&société, no Vol. 11, N° 1 (septembre): 7‑45. https://doi.org/10.4000/ticetsociete.2236.

Leclercq, Bruno. 2014. « Qu’est-ce qu’un savoir critique ? » In Leurres de la qualité dans l’enseignement supérieur ? Variations internationales sur un thème ambigü, édité par Bruno Leclercq et Catherine Fallon, 31‑49. Louvain-la-Neuve: Academia. http://orbi.ulg.ac.be/handle/2268/143333.

Masterman, Len. 1985. Teaching the Media. Comedia.

Odin, Roger. 2011. Les espaces de communication: introduction à la sémio-pragmatique. La communication en plus. Saint-Martin-d’Hères (Isère): Presses Universitaires de Grenoble.

Rancière, Jacques. 2008. Le spectateur émancipé. La fabrique éditions.

Souchier, Emmanuël, Gustavo Gomez-Mejia, Valérie Jeanne-Perrier, et Étienne Candel, éd. 2019. Le numérique comme écriture. Théories et méthode d’analyse. Paris: Armand Colin.

Tardy, Cécile, et Yves Jeanneret, éd. 2007. L’écriture des médias informatisés: espaces de pratiques. Paris: Hermès science.

Zuboff, Shoshana. 2019. The Age of Surveillance Capitalism: The Fight for a Human Future at the New Frontier of Power. 1er édition. New York: PublicAffairs.

Quelle transposition didactique pour l’éducation aux médias et à l’information ? Réflexions depuis la lecture d’Anne Cordier (2023. Grandir informés: Les pratiques informationnelles des enfants, adolescents et jeunes adultes. C&F Editions)

Bien que la recherche consacrée aux aspects didactiques de l’éducation aux médias et à l’information ne soit pas inexistante (Kerneis 2010; 2017)[1], la littérature scientifique se montre peu bavarde sur la question. Et pour cause : comme le soulignent Fastrez et al. dans une enquête à grande échelle (Fastrez et al. 2022), le caractère transversal du champ disciplinaire entrave le développement de curricula scolaires spécifiques (Ibid.,78) et, de là, la recherche scientifique sur son enseignement. Au premier chef, la didactique disciplinaire engage un questionnement sur la matière à enseigner, sa légitimité sociale à l’être, et la manière dont elle le sera (Chevallard [1985] 1998) : la transposition didactique opère ainsi une transformation adaptative (Ibid., cité par Reuter et al. 2013, 221) d’un savoir savant, pratique, expert ou professionnel en matière enseignable et ce, à deux niveaux : (i) une transposition externe émanant de l’institution scolaire, organisant la progression des apprentissages au sein des programmes, et (ii) une transposition interne, qui est le fait de l’enseignant en situation de classe.

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